Mon inconscient, ce criminel

1/03/2017 Alice 0 Comments



Voici un nouvel article issu d'une discussion que j'ai eue avec une amie auteure. Nous étions en train de parler de la façon de juger si une idée était bonne ou pas, sans avoir à y perdre trop de temps. Défi un brin complexe puisque j'assimile volontiers une idée de texte à la vie d'un vin. C'est-à-dire que certaines mériteront de maturer tandis que d'autres seront à exploiter aussitôt sorties de la treille.

Premièrement, j'ai tendance à penser qu'il n'y a pas réellement de mauvaises idées. Il peut y en avoir qui souffrent de clichés, qui sont trop fortement inspirées d'une autre histoire, mais elles ne sont pas en mauvaises en elles-mêmes.
Par contre, quand il s'agit des "vraies" bonnes idées, celle qu'on ne peut pas lâcher, qui parlent à la fois à la tête, au cœur et aux tripes, j'ai mon petit truc pour les repérer. La méthode est simple, il suffit que je piège mon inconscient ou plus exactement que je le choppe en flagrant délit.

Car ce petit criminel de hauts-étages mène sa vie de son côté. Je l'imagine assez bien comme une sorte d'énorme blob monoculaire qui regarde passer les idées et les informations devant lui tout en sirotant son thé. Parfois, il lève l’œil au ciel et parfois il s'empare de l'une d'entre elles.
Innocente que je suis, j'ai beaucoup de mal à accéder à cette information, sauf lorsque le "hasard", la fortune, mon ange gardien, ma bonne étoile, un fortune cookie, (bref vous aurez compris) me fait entrer sur la scène de son dernier crime.

Le plus souvent, cela m'arrive quand une idée remonte et que je ne sais pas si elle exploitable pour moi. Est-ce que je pourrais y développer mon univers ? Puis-je y trouver un sens qui m'aidera à transmettre ma façon de penser ?
Dans ce cas-là, rien de tel pour moi qu'un moteur de recherche. Pour illustrer cela je vais vous donner un exemple concret :
J'avais depuis longtemps déjà développer un univers et une histoire dans laquelle il me manquait un élément crucial. Après réflexion, j'avais décidé que cet élément serait un arbre que j'avais bien envie d'appeler "Dragonnier" en le dotant d'un background du type "Il est issu du sang d'un dragon etc." Jusqu'ici vraiment pas de quoi sauter au plafond vu le côté stéréotypé du bidule. Mais cela collait vraiment à mon univers, du coup j'ai persisté et j'ai commencé à voguer ici et là sur des images d'arbres exotiques pour en trouver un avec une forme qui pourrait lui convenir.
Après moult déceptions, toujours très innocente, je tape les mots "arbre" et "dragon".
Vous me voyez venir ?
La première image de la galerie de photos me présente alors un arbre proche du baobab mais en plus hirsute. Je clique dessus, titre de la page : Le Dragonnier ou arbre de Sang-Dragon.
Inutile de vous dire que j'étais plus qu'étonnée au prime abord. Et que j'ai vite changé le nom de Dragonnier en Arbre de Sang-Dragon qui faisait autrement plus bad-ass à mon goût.

Mais le plus important pour moi a été d'avoir réussi à piéger mon inconscient. Puisque je ne me considère pas comme un génie qui invente des choses qui existent déjà, (D'ailleurs, est-ce vraiment ça un génie ?) j'ai bien compris que j'avais dû avoir accès à ce fameux arbre un jour, sans consciemment y faire attention. Toutefois, mon petit Arsène Lupin cérébral l'a rangé directement au milieu de sa collection d'image, de faits et d'idées qui pourraient bien me servir un jour.

Et là où je dis encore plus eurêka, c'est que puisqu'il l'a stockée, il y a réfléchi "à ma place". Et comme toujours dans ces cas-là, la réapparition de l'image s'accompagne d'un background bien vieilli dans la cave qui me sert de boîte cranienne.

Pour moi, ça a toujours été la marque d'une idée qui pouvait fonctionner. Parce qu'elle était mûre certes mais aussi parce que je l'avais retenue. Elle fait donc partie de mon univers, de ce qui fait que je n'imagine pas les choses comme mes autres copains auteurs (de la même façon qu'eux n'imagine pas les mêmes choses que moi). Et c'est pour moi, la marque principale d'une "vraie" bonne idée.

Elle n'est peut-être pas follement originale, ni digne d'un prix Nobel de Littérature, mais elle est bien à moi.

Ensuite, j'entends déjà ceux qui me diront "Ouais mais si tu mûris l'idée d'un autre, ce n'est toujours pas ton idée." C'est là que je dois donc préciser ce que mûrir une idée veut dire pour moi.
Une idée mûre pour moi est une idée qui s'accompagne déjà de tout son univers. Elle aura une voix, un goût qui n'appartient qu'à elle, un parfum unique, un toucher propre à ma sensibilité. Mûrir une idée ce n'est pas changer deux lettres d'un nom et réécrire Eragon sous le titre de Aregon. Bien sûr, je me serais peut-être inspirée des écrits de quelqu'un d'autre mais cela n'aura plus du tout le même sens, ni la même couleur, ni les mêmes résonances s'il s'agit bien d'une idée qui m'appartient. Je vais poser une question qui risque d'en irriter plus d'un mais : Est-ce que choisir une elfe comme personnage c'est plagier Tolkien ? Même si cette elfe est la danseuse étoile du Bolchoï ?

Là où ça pourra en devenir c'est si le régisseur du Bolchoï à une double personnalité (Golum ! Golum !) et que le président de la Russie enferme son pire ennemi tout en haut du Kremlin ignorant que celui-ci s'est allié avec un troupeau de Pégases de l’Antarctique qui vont l'aider à s'échapper. Pire ennemi du président qui fait tout pour que deux gnomes arrivent à ramener une coupe mystérieuse jusqu'en Italie pour la détruire dans le cratère du Vésuve. Pour finir avec notre danseuse étoile elfe qui fête ses épousailles avec le tout nouveau Président élu (parce que l'ancien s'est retrouvé aux prises avec une armée de cactus géants extra-terrestres, vous comprenez ?).

Pour conclure donc, mes vraies bonnes idées sont celles qui ont mûri dans ma tête. Comment je les repère ? Le plus souvent en piégeant mon inconscient. Quant aux autres, plus fugaces et plus éphémères, je n'ai pas encore pris mon bandit préféré en flagrant délit sur ce sujet.






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